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Patrick Neiertz, « Voltaire et les économistes »

mercredi 25 mai 2011

Revue Voltaire, 11 (2011) , p.287-319.
Patrick Neiertz, « Voltaire et les économistes »

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L’économie politique, qui acquiert son statut de science durant les Lumières, ne pouvait que passionner Voltaire. D’abord parce que, philosophe, il comprend que la phénoménologie de l’économie interroge l’éthique, la politique et l’épistémologie. Mais aussi parce qu’il est lui-même un praticien de l’économie : économie financière et marchande durant les années où il bâtit une fortune conséquente, gage de son indépendance d’intellectuel ; économie réelle durant les décennies de Genève et Ferney quand il devient entrepreneur d’agriculture puis commanditaire de diverses manufactures, dont la fameuse manufacture horlogère de Ferney. Toute sa vie, Voltaire est en rapport personnel avec les meilleurs économistes de son temps : Melon, Forbonnais, Gournay, Morellet, Hume, Dupont de Nemours, Turgot, Adam Smith. Sa bibliothèque reflète cet intérêt, qui collectionne les ouvrages et les revues spécialisés. Mais ses réactions les plus vives (dans l’approbation comme le rejet) s’adressent aux idées de ceux à qui l’on réserve alors le terme d’Economistes : les physiocrates. Quesnay, Mirabeau le père, Le Mercier de la Rivière, Baudeau, Roubaud sont, à des titres divers, l’objet de ses écrits ou de sa correspondance. Ses vues économiques sont en général dispersées et fragmentaires dans l’œuvre composée mais ont aussi inspiré des passages entiers de l’Essai sur les Mœurs, du Siècle de Louis XIV, de L’Homme aux quarante écus, des Questions sur l’Encyclopédie et des écrits spécifiques comme Le Mondain ou les Observations sur MM. Jean Lass, Melon et Dutot.

Political economy becomes a self-standing science during the French and English Enlightenments. As a philosopher and an encyclopaedist, Voltaire was either a reader or a friend of the main economists of the time, from William Petty –whom he read– to Adam Smith –whom he received several times at Ferney. Among the French economists, he was a life-long devotee of Melon (himself a follower of Mandeville on luxury). Vis-à-vis the physiocrats, he mustered a love-hate relationship : he hailed, as they did, agriculture as the main source of wealth, but he strongly rejected the fiscal consequences that Mirabeau tried to impose on Quesnay’s doctrinal teachings (the ‘Impôt unique’) and –most vehemently– the social and political system that Le Mercier de la Rivière saw as a natural order of an agrarian society : both are very wittily satirised in L’Homme aux quarante ecus. His relationship with Turgot and his deputy Dupont de Nemours is one of the most interesting intellectual and tactical approaches to political economy undertaken by the Ferney’s Patriarch.