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Marine Roussillon, « La Princesse de Navarre et la résurrection de la comédie-ballet »

vendredi 28 mars 2014

Revue Voltaire, 14 (2014), p. 273-285.

Marine Roussillon, « La Princesse de Navarre et la résurrection de la comédie-ballet »

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La Princesse de Navarre, créée à Versailles le 23 février 1745, est une pièce hybride, mêlant le théâtre, la danse et les chants. Dès la première publication de la pièce, cette hybridité est rapportée au genre de la comédie-ballet, genre disparu (sous cette forme du moins) depuis la mort de Molière et les dernières fêtes de Louis XIV. Quelles significations donner à cette résurrection ?
Il s’agit d’abord de s’approprier l’esthétique galante des divertissements de Louis XIV, fondée sur la diversité et le contraste, et de la mettre au service de la célébration du pouvoir de Louis XV. Le choix de la comédie-ballet est donc un choix de convenance politique, au premier abord peu glorieux pour Voltaire. En écrivant une comédie-ballet, celui-ci adopte en effet la posture de l’auteur courtisan, « bouffon » du souverain. Cette posture lui permet d’obtenir la récompense d’autres services d’écriture, plus difficiles à revendiquer en public et ne relevant pas d’une logique du divertissement. Enfin, la forme hybride de La Princesse de Navarre sert Voltaire dans les querelles qu’il a engagées non seulement contre la comédie larmoyante mais aussi pour le renouveau de l’opéra. La pièce prolonge le débat entre Voltaire et Rameau ouvert par Samson.
Avec La Princesse de Navarre, Voltaire ne cherche donc pas à ressusciter Molière. Il ne fait pas sienne l’esthétique galante de la comédie-ballet, pas plus qu’il n’adhère à la posture d’écrivain courtisan. Il convoque les valeurs du passé pour en tirer profit – symbolique, mais aussi matériel – dans les conflits du présent.