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Béatrice Didier, « Voltaire et la crise du poème lyrique »

jeudi 28 mars 2013

Revue Voltaire, 13 (2013), p. 19-29.

Béatrice Didier, « Voltaire et la crise du poème lyrique »

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L’impossibilité où s’est trouvé Voltaire de donner ce grand chef-d’œuvre de poésie lyrique qu’il aurait aimé réaliser semble due en grande partie à la conscience aiguë qu’il a eue des problèmes et de l’évolution d’un genre complexe, paradoxalement hybride et fécond.
Le livret d’opéra (que le XVIIIe siècle désigne par le terme de poème lyrique) traverse une crise peut-être encore plus grave que celle de la poésie. Le statut du livret est inconfortable par lui-même et il est entraîné dans toutes les querelles de l’opéra issues des profondes transformations du genre lyrique au XVIIIe siècle.
Voltaire voudrait renouveler les sujets, en recourant à d’autres mythologies que gréco-romaines : la Bible, l’Égypte ; il voudrait délivrer l’opéra des prologues mythologiques, des lieux communs de la galanterie, des conventions relatives aux chœurs, aux récitatifs. Il s’interroge sur le rôle des ballets, sur la nécessité de recourir à la versification et d’accorder rythme du vers et rythme musical. Il voudrait surtout créer un opéra philosophique, avec Samson, avec Pandore. Les difficultés qu’il rencontre ne sont pas seulement d’ordre politique (peur de la censure, timidité des responsables des salles lyriques) : il est difficile de faire chanter un discours philosophique. Le recours aux grands mythes permet de surmonter cette difficulté.
Le bilan de Voltaire librettiste est, en définitive, positif : il a été amené à formuler une poétique de l’opéra, vigoureuse et en partie originale. Certains passages de ses livrets atteignent une réelle grandeur, enfin son théâtre a été incontestablement vivifié par son expérience de l’opéra.