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A. Gurrado, « Le rôle de Condillac dans la genèse de la Lettre sur le Messie de Voltaire »

dimanche 8 janvier 2012

Revue Voltaire 12 (2012), p. 275-283
Antonio Gurrado, « Le rôle de Condillac dans la genèse de la Lettre sur le Messie de Voltaire »

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La Lettre sur le Messie est un court écrit en prose de Voltaire, adressé en 1758 à un « Monsieur » non identifié, où pour la première fois Voltaire tente d’appliquer la même critique exégétique au judaïsme et au christianisme. Seul deux manuscrits de ce texte subsistent : le premier, de la main de Voltaire, se trouve à Saint-Pétersbourg et a été publié dans le tome 49A des Œuvres complètes de Voltaire en 2010 ; l’autre, copié par un inconnu, est aux Archives d’État de Parme. Dans cette dernière version, il a été publié pour la première fois par Roland Desné et Anna Mandich en 1991 ; ces éditeurs proposent aussi une liste de destinataires probables. Condillac, qui dès avril 1758 était précepteur du petit prince Ferdinando à Parme, figure dans cette liste mais sans preuves concluantes à l’appui. Dans mon article, j’essaye de prouver cette hypothèse en répertoriant les indices qui se trouvent dans le manuscrit de Parme – à savoir des similitudes entre ce texte et l’unique lettre de Voltaire à Condillac que l’on connaisse – et qui laissent supposer que Condillac en pourrait être le fameux destinataire. Ces indications ne sont pourtant pas probantes, mais elles sont corroborées par l’analyse du texte de l’Histoire ancienne que Condillac avait composé pour Ferdinando dans son Cours d’études. On trouve ici un passage sur l’image du Messie des Hébreux, et sur les raisons historiques et exégétiques qui ne permirent pas qu’ils l’identifiassent avec Jésus Christ : ce passage contient de frappantes ressemblances textuelles avec le contenu de la Lettre sur le Messie. Des ressemblances si évidentes laissent à penser que Condillac était le destinataire le plus probable de l’écrit voltairien, comme la lecture parallèle des deux textes laisse aisément deviner ; et même à supposer que Condillac n’ait pas été le « Monsieur » anonyme, il était assurément au courant du contenu détaillé de la Lettre sur le Messie, de sorte que les idées du plus iconoclaste des exégètes réapparaissaient, presque dissimulées, dans le manuel d’histoire d’un jeune prince chrétien.